Recherche cinéphilie désespérément
La fédération nationale des
ciné-clubs (FNCCM) réunit son université d’été
du 4 au 7 septembre dans la ville côtière de Mohammedia. Un espace
porteur d’inspiration certaine puisque la ville n’est pas seulement
l’expression de la modernité marocaine mais à une tradition historique, celle
d’abriter des rencontres décisives y compris dans l’histoire des ciné-clubs
avec notamment un célèbre stage au début des années 70 animé par N. Sail et
Abdellah Laroui !!!!
C’est d’ailleurs face à ce lourd
héritage que la FNCCM cherche toujours un nouveau démarrage. Les choses ont
évolué et les ciné-clubs ont connu une dure période de traversée de désert.
Situation générant un nouveau paradoxe : au moment où la production
cinématographique nationale connaît un réel dynamisme, la cinéphilie a
pratiquement disparu de l’espace public. Des générations entières arrivent
aujourd’hui à la pratique cinématographique voire à la profession carrément par
le seul biais de la technologie sans background culturel !
C’est certainement le souci et
plus sûrement encore l’objectif implicite de ce retour à la vie de l’activité
des ciné-clubs, du moins par le haut, à
savoir par la redynamisation de l’action de la FNCCM. La formule de
l’université d’été a été initiée en 1993, elle en est aujourd’hui à sa sixième
édition. Le programme proposé aux animateurs invités est riche et diversifié
même s’il pose des questions de « pertinence » au sens pédagogique du
terme.
L’une des séquences phares de
cette édition est l’hommage rendu à des figures historiques des ciné-clubs.
Saad Chraïbi, l’un des rares cinéastes en exercice à être l’émanation des
ciné-clubs ; pendant longtemps il a animé et dirigé un ciné-club et a été
membre fédéral. Hassan Ouahbi, une figure de la culture cinématographique à
Marrakech, véritable mémoire vivante du cinéma marocain. Discret et serviable,
il est de toutes les rencontres où l’on défend le cinéma à l’école. Il anime et
dirige un ciné-club scolaire qui est une vraie réussite. Mostafa Alouani qui a
suivi la voie royale qui mène des ciné-clubs (notamment à Casablanca) à la critique cinématographique. Travaille
généreusement et avec passion pour propager
la culture cinématographique dans le milieu associatif.
Le programme de l’université
d’été comprend également des séances-ciné-clubs, une master class autour de
Saad Chraïbi, animée par Youssef Ait Hammou ; un concours de courts métrages
dédié à la mémoire de Mohamed Reggab. Le jury de cette édition est d’ailleurs
présidé par son fils, le cinéaste prometteur Younes Reggab.
Cédant à une pratique qui
contamine toutes les manifestations de cinéma au Maroc, la FNCCM a programmé
également des ateliers de « formation » au montage numérique, à
l’écriture de scénario à la direction
photo…d’où la question de la pertinence que nous n’hésitons pas à
poser : le rôle d’un ciné-club consiste-t-il à former à la technique du
cinéma ou à initier à la culture du cinéma ? Le rôle d’un ciné-club est de
promouvoir la cinéphilie, d’autant plus dans un contexte où la cinéphilie bat
de l’aile et où les espaces dédiés au discours cinéphilique se réduisent comme
peau de chagrin. En cédant à la mode du « tout technique » le
ciné-club faillit à sa mission. Il aurait été plus pertinent me semble-t-il de
faire revivre la mémoire cinéphile en demandant à Hassan, Saad et Mostafa de
présenter au jeune public présent le film qui les a marqués dans leur longue
carrière d’animateur de ciné-club.
Un ciné-club ne peut se
substituer à une école de cinéma ; au contraire un ciné-club
« civil » peut compléter le rôle d’une école de cinéma en remplissant
les blancs et les trous de mémoire d’une formation technique. N’a-ton pad dit
que « là » on forme des assistants à la réalisation et
« ici » on forme des cinéastes !
M.B
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