vendredi 5 septembre 2014

les ciné-clubs en conclave à Mohammedia

Recherche cinéphilie désespérément



La fédération nationale des ciné-clubs (FNCCM) réunit son université d’été  du 4 au 7 septembre dans la ville côtière de Mohammedia. Un espace porteur d’inspiration certaine puisque la ville n’est pas seulement l’expression de la modernité marocaine mais à une tradition historique, celle d’abriter des rencontres décisives y compris dans l’histoire des ciné-clubs avec notamment un célèbre stage au début des années 70 animé par N. Sail et Abdellah Laroui !!!!
C’est d’ailleurs face à ce lourd héritage que la FNCCM cherche toujours un nouveau démarrage. Les choses ont évolué et les ciné-clubs ont connu une dure période de traversée de désert. Situation générant un nouveau paradoxe : au moment où la production cinématographique nationale connaît un réel dynamisme, la cinéphilie a pratiquement disparu de l’espace public. Des générations entières arrivent aujourd’hui à la pratique cinématographique voire à la profession carrément par le seul biais de la technologie sans background culturel !
C’est certainement le souci et plus sûrement encore l’objectif implicite de ce retour à la vie de l’activité des ciné-clubs, du moins par le haut,  à savoir par la redynamisation de l’action de la FNCCM. La formule de l’université d’été a été initiée en 1993, elle en est aujourd’hui à sa sixième édition. Le programme proposé aux animateurs invités est riche et diversifié même s’il pose des questions de « pertinence » au sens pédagogique du terme.
L’une des séquences phares de cette édition est l’hommage rendu à des figures historiques des ciné-clubs. Saad Chraïbi, l’un des rares cinéastes en exercice à être l’émanation des ciné-clubs ; pendant longtemps il a animé et dirigé un ciné-club et a été membre fédéral. Hassan Ouahbi, une figure de la culture cinématographique à Marrakech, véritable mémoire vivante du cinéma marocain. Discret et serviable, il est de toutes les rencontres où l’on défend le cinéma à l’école. Il anime et dirige un ciné-club scolaire qui est une vraie réussite. Mostafa Alouani qui a suivi la voie royale qui mène des ciné-clubs (notamment à Casablanca)  à la critique cinématographique. Travaille généreusement et avec passion  pour propager la culture cinématographique dans le milieu associatif.
Le programme de l’université d’été comprend également des séances-ciné-clubs, une master class autour de Saad Chraïbi, animée par Youssef Ait Hammou ; un concours de courts métrages dédié à la mémoire de Mohamed Reggab. Le jury de cette édition est d’ailleurs présidé par son fils, le cinéaste prometteur Younes Reggab.
Cédant à une pratique qui contamine toutes les manifestations de cinéma au Maroc, la FNCCM a programmé également des ateliers de « formation » au montage numérique, à l’écriture de scénario à la direction  photo…d’où la question de la pertinence que nous n’hésitons pas à poser : le rôle d’un ciné-club consiste-t-il à former à la technique du cinéma ou à initier à la culture du cinéma ? Le rôle d’un ciné-club est de promouvoir la cinéphilie, d’autant plus dans un contexte où la cinéphilie bat de l’aile et où les espaces dédiés au discours cinéphilique se réduisent comme peau de chagrin. En cédant à la mode du « tout technique » le ciné-club faillit à sa mission. Il aurait été plus pertinent me semble-t-il de faire revivre la mémoire cinéphile en demandant à Hassan, Saad et Mostafa de présenter au jeune public présent le film qui les a marqués dans leur longue carrière d’animateur de ciné-club.
Un ciné-club ne peut se substituer à une école de cinéma ; au contraire un ciné-club « civil » peut compléter le rôle d’une école de cinéma en remplissant les blancs et les trous de mémoire d’une formation technique. N’a-ton pad dit que « là » on forme des assistants à la réalisation et « ici » on forme des cinéastes !
M.B


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