Les ciné-clubs, le retour?
le jury Reggab
La fédération nationale des ciné-clubs vient d’organiser la
sixième édition de son université d’été. Un rendez-vous qui a tenu globalement
ses promesses et a répondu aux attentes de ses initiateurs, notamment le bureau
fédéral fier de présenter un premier bilan chiffré avec le nombre de
participants qui avoisinent la centaine représentants une trentaine de ciné-clubs.
Une fierté toute légitime, car la FNCCM revient de loin. Créée en 1973, cette
structure a forgé sa réputation par son
indépendance et par son dynamisme ; elle a connu ses années de gloire durant
la décennie des années 70 pour voir son déclin entamé avec les années 80
« le moyen âge » de la culture…pour vraiment se contenter de végéter,
vivoter les années suivantes. La crise était complexe. Elle était à la fois
dans le sujet et dans l’objet. La fédération des ciné-clubs laminés par des
querelles intestines n’avaient pas vu ou n’avait pas pu voir venir les
métamorphoses qui ont touché son champ d’action. A la fois en amont puisque l’économie du
cinéma lui-même a imposé de nouvelles règles de circulation des films et en
aval avec l’arrivée de l’ère de la consommation « domestique » des
images. Le cinéma est passé de la sphère publique, lieu de prédilection du
spectateur cinéphile et potentiel membre du ciné-club, à la sphère privée. Le
cinéphile n’est plus ce citoyen impliqué dans sa ville, mais un individu
soucieux de son confort « tribal ». Le Maroc était entré dans
l’époque postmoderne, réticente à toute pensée globalisante et prétendant à la
totalité. Caractéristiques majeures du discours cinéphile de la belle époque.
Aujourd’hui, après de laborieuses expériences qui ont permis
– au mieux - de sauvegarder la structure, nous assistons à un regain (pour
reprendre le titre d’un film de Marcel Pagnol, diffusé justement dans le cadre
des ciné-clubs) d’activités et un dynamisme venant d’en haut principalement.
Car à la base, la pratique des ciné-clubs est ramenée le plus souvent à
l’organisation de rencontres épisodiques voire se contentant d’une
manifestation cinématographique annuelle drainant quelques stars locales. Il
est révolu le temps du rituel dominical de la séance hebdomadaire qui
réunissait les adhérents, ponctuels, attentifs et désireux de découvrir le
monde (et rêver de le changer) à travers son cinéma. D’où une conséquence
majeure qui caractérise le paysage cinématographique, le repli de la culture
cinéphilique, aucune structure n’étant venu combler le vide laissé par les
ciné-clubs. C’est le déficit que tente de combler le bureau de la FNCCM en
multipliant les rencontres thématique et surtout en annonçant son intention de
faire de son université d’été son activité phare, son emblème.
La sixième édition a connu un succès certain malgré les aléas
traditionnels de la logistique. C’est la première tache à laquelle il faut
s’astreindre désormais : assurer des conditions de projection optimales pour
les films programmés; l’éducation du regard inscrite dans les gênes d’un
ciné-club passe par là ! C’est la condition sine qua none de la réussite
d’une rencontre de cinéphiles. En outre, il nous semble que la programmation
générale souffre d’une surcharge thématique…cela donne l’impression d’une
véritable boulimie ; comme pour rattraper le temps perdu. L’organisation d’un concours
de courts métrages au sein de l’université crée une ambiance de compétition
incompatible avec l’esprit d’une université d’été. Pourquoi ne pas consacrer au
concours Reggab du court métrage, une plage propre dans le calendrier et
préserver le caractère strictement cinéphile de l’université d’été. Cela aura
des répercussions sur l’économie générale du programme : le master class et
la table ronde avaient pâti du manque de temps. Lançons un débat à ce
propos !
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