…Le projet
ambitieux de parvenir à un téléfilm hebdomadaire a créé une véritable onde de
choc qui a secoué une profession habitée par une léthargie née des années de
chômage technique. Un véritable appel d’air a été lancé. La machine s’est mise
à tourner. Tous les discours théoriques d’antan sur «la crise de la création ou
crise de la production de la fiction marocaine» ressassés des années durant ont
eu à passer l’épreuve de l’action. La preuve était donnée qu’une nouvelle fois
c’est la fonction qui crée l’organe : il y avait une crise de scénario, de
scénariste ; c’est normal il n’y avait pas de production. Du coup quand 2M a
ouvert ce chantier, des jeunes se sont mis à l’écriture, des passions ont été
suscitées ; bien sûr avec des fortunes diverses mais l’essentiel est que des
Marocains se sont mis à imaginer des histoires marocaines pour une télévision
marocaine.
Ghazl Alouakt
est encore une fois représentatif de cette ouverture sur de nouvelles compétences,
sur de nouveaux horizons de la production de l’imaginaire. Mohamed Chrif Tribak
est un jeune cinéaste venu de la cinéphilie ; c’est un membre actif du
ciné-club de sa ville ; il a commencé son projet de cinéaste par le court
métrage. La télévision lui a donné une nouvelle chance : passer à un format
supérieur dans un contexte inédit, qui n’est pas celui du cinéma classique mais
qui le place dans les conditions de travail d’un long métrage. Il faut dire
qu’il a attrapé le virus puisque Ghazl Alouakt est son troisième téléfilm. Le
premier, Les chevaux hennissent avant de tomber est un petit chef d’œuvre de télévision : il y a un univers, une
ambiance, la mise en place d’une complicité entre toute une équipe de travail.
Celle-ci récidive avec Ghazl Alouakt. Tribak, à l’instar d’une pratique que
font les grands du cinéma, je pense à Chahine, Cassavetes ou à Truffaut… s’est
entouré d’une véritable famille ; le même scénariste, l’essentiel de l’équipe
technique et surtout des comédiens qu’il a amenés pour la première fois et que
nous aimons déjà ; deux noms sont à souligner et à ne pas oublier: Messoud
Bouhcine et Sami Azouaoui. Ils sont tout simplement formidables. Pour le reste,
le téléfilm ne recrée pas le langage du cinéma et ne réinvente pas la télévision ; il n’est même pas le reflet
d’une époque, il est tout simplement l’expression d’une sensibilité, vecteur
d’une émotion. Et ma foi, Tribak et sa bande, vendredi dernier, ont fait vibrer
une fibre, redonner une âme à la télévision.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire