samedi 24 janvier 2015

Le documentaire à la télévision

Le documentaire peut-il sauver la télévision ?
Il y a comme un engouement insolite pour le documentaire dans la programmation des chaînes de télévision du pôle public. Peut-être que d’un point de vue historique stricto sensu, il est plus juste de parler d’un retour d’intérêt pour le documentaire sur nos télévisions. Il y a en effet  toute une histoire à écrire à ce propos. L’histoire se répète-t-elle ? Un grand Monsieur avait dit que quand elle (l’histoire) revient, c’est sous forme d’une farce. Attendons pour voir.
Il y a ainsi 2M qui a ouvert tout une fenêtre pour le documentaire à un créneau horaire très porteur, le dimanche en seconde partie de soirée. Un moment idoine dans notre contexte socio-culturel. Des Histoires et des Hommes (même si les femmes sont omniprésentes) a très vite séduit et ramené un large public pour un genre taxé un peu rapidement d’élitiste. Le film de Dalila Ennadre, Des murs et des hommes a rencontré un immense succès chez de larges couches de la population cathodique. Pour 2M, ce fut une bonne option qui lui a donné de l’appétit au point de réaliser une OPA sur un festival de documentaire, le FIDA-DOC d’Agadir, devenu la vitrine de la chaîne de Ain Sbaâ et son magasin pour le shopping du dimanche... Si c’est pour la bonne cause, tant mieux.
La première chaîne n’est pas restée loin de ce filon en lançant un moment original au titre maladroit « Tiarat » (tendances) qui renvoie plutôt à une émission politique qu’à un programme de documentaire. Ce titre générique accueille des documentaires produits par la chaîne en partenariat avec Ali’n production, la société de Nabil Ayouch. Deux points font son originalité jusqu’à présent : chaque « épisode » en fait chaque film d’une soixantaine de minutes est construit autour d’une thématique particulière. Lundi dernier (19 janvier) c’était à propos des salles de cinéma ; une  autre fois c’était autour des acteurs au Maroc. La deuxième originalité est que chaque opus est confié à un cinéaste (Zakia Tahiri pour les acteurs, Faouzi Bensaïdi pour les salles). Très bien sommes-nous tentés de dire et même d’ajouter : Pourvu que ça dure !
D’où vient cet engouement subi pour un genre, longtemps ignoré ?  C’est la conséquence de la crise au sens large : la crise du sens dans le monde ; la crise de la fiction face à la complexité du réel et la crise identitaire de la télévision qui se cherche une  nouvelle virginité.  Le documentaire se présente alors comme une planche de salut, une manière de redorer le blason. Sauf que le documentaire va très vite fonctionner comme révélateur des lacunes structurelles (politiques et culturelles) des uns et des autres.

Soulignons en outre un paradoxe qui atténue l’enthousiasme des cinéphiles : l’option pour le documentaire a fait une victime collatérale : la programmation cinéma en général. Celle-ci est devenue le parent pauvre des deux chaînes publiques. Le documentaire n’est venu hélas que pour camoufler le repli de la télévision sur d’autres zones éditoriales. Un ersatz des télé-poubelles qui viennent du nord (M6 et TF1).

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