lundi 5 mai 2014

Faouzi Bensaidi et le football

Faouzi Bensaïdi filme l’hors jeu


Finalement le Maroc ne sera pas totalement absent du mondial brésilien de juin prochain. Et ce sera grâce au cinéma ; grâce en particulier à Faouzi Bensaïdi. L’auteur du mythique Mille mois et dernièrement de Mort à vendre a été, en effet,  sollicité, avec une trentaine de cinéastes dans le monde, à  contribuer à une commande de la FIFA consistant à réaliser un court métrage de cinq minutes autour de la thématique du football. La trentaine de films ainsi obtenus seront diffusés via la télévision pendant le déroulement de la coupe du monde. « C’est une commande à laquelle je n’ai pas hésité à répondre  ayant été séduit et intéressé par l’idée. » Il s’inscrit ainsi dans la logique qui marque sa brillante carrière aussi bien en tant que cinéaste qu’en tant que homme de théâtre qu’il a été à l’origine. Tous ses films obéissent à une volonté « d’expérimenter » de nouvelles pistes et de refuser de s’enfermer  dans les sentiers battus. « Je n’ai pas peur de la commande, nous dit-il. Quand on a un monde intérieur, une vie intérieure…ils arrivent toujours à transpercer et à traverser la commande d’une manière volontaire ou involontaire…nous ne regardons le monde qu’à travers une vision et cette vision s’impose d’elle-même. D’autre part, cette idée de la contrainte est toujours source de la création. Ma pensée profonde c’est que si la contrainte n’est pas là, peut-être même qu’il faut l’inventer…les cinéastes, et l’histoire du cinéma en témoigne, qui ont eu beaucoup de moyens pour certains de leurs projets les ont finalement ratés. Alors que lorsque ils ont travaillé dans la douleur et la contrainte, ils ont donné des chefs-d’œuvre ».
Cet exercice autour du football en tant que sujet  peut être compris dans ce sens. D’autant plus que le canevas est très ouvert nous dit Faouzi Bensaïdi dans une déclaration à Albayane. Il s’agit de partir de l’une des règles du football (le pénalty, le corner…) pour proposer une fiction. Chacun des 31 cinéastes étant libres  de lui donner la forme et le contenu qu’il souhaite. « Mon film s’intitule Outsiders ; il s’inspire de la fameuse règle, très controversée par ailleurs,  de l’hors jeu ; je m’y suis retrouvé ; me considérant un peu et tout le temps hors jeu, comme d’ailleurs la plupart de mes personnages qui sont toujours en déphasage  par rapport à un système. Mes  films sont peuplés de marginaux. J’ai ainsi, dans une sorte de clin d’œil, mobilisé pour ce court métrage, les comédiens qui ont joué dans Mort à vendre : Fahd Benchemsi, Mohcine Malzi et Fouad Labied ». Dans le film, ils incarnent des marginaux emblématiques de tout un cinéma : « J’ai inventé une histoire pour eux ; pour des garçons vivant de petits trafics ; ils sont en fait hors jeu…on les voit dans le film voler des ballons ; ils ne sont pas dans le jeu ;  ce sont des outsiders ».
Interrogé sur son rapport au football, Faouzi Bensaïdi nous dit qu’il y a deux phases dans sa vie : l’une, celle de l’enfance et du début de la jeunesse, était dédiée au football et la suivante au cinéma. « J’ai beaucoup joué au football dans le cadre des équipes de quartiers et des compétitions locales. J’étais capitaine de l’équipe de mon quartier et je jouais comme milieu de terrain offensif (un numéro 8 de l’époque) ; je n’étais pas particulièrement bon ; mais j’aimais orienter, diriger les autres joueurs ; j’étais entraineur, en fait c’était moi qui m’occupait de la logistique». Metteur en scène déjà en quelque sorte. Sur le joueur qui l’avait marqué, le meknassi n’a pas hésité une seconde «  Feu Aziz Daidi, bien sûr. ». Un bel hommage à l’élégant et regrette numéro  10 du CODM de la belle époque. Sur le plan international Faouzi Bensaïdi cite Maradona : «  un grand joueur certes,  mais j’ai aussi beaucoup d’affection pour le personnage, son parcours atypique. »
Faouzi Bensaïdi qui avait signé avec son premier film, La falaise, le court métrage le plus titré de la filmographie marocaine, soulève une autre dimension pour ce projet ; c’est que le court métrage, format « marginalisé » par les grands circuits commerciaux va bénéficier de l’impact de la coupe de monde, l’événement le plus médiatisé de la planète.

Mohammed Bakrim

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