dimanche 28 septembre 2014

Quelle formation pour le cinéma au Maroc?

La rentrée des classes est là ; personne ne peut en préciser la date exacte, car c’est tout le long de septembre qu’on ne cesse de rentrer !!! J’appartiens à la génération bénie qui a eu la journée universelle de reprise du chemin de l’école incarnée par le mythique premier d’octobre, avec son atmosphère automnale authentique, ses maîtres respectés et heureux…Bref c’est fini tout cela, et aujourd’hui autres générations autres mœurs.
Le cinéma a aussi un œil sur le calendrier scolaire, non pas pour sa synchroniser sa rentrée avec la sienne mais parce que le cinéma est de plus en plus une affaire d’écoles. Le pluriel est pertinent puisque le nombre d’établissements impliqués dans la formation aux métiers du cinéma fait florès ! Il y a quelques années à peine, disons vers la fin des années 90, c’était la pénurie, le vide en matière de formation académique.  C’était au moment où le pays comptait encore une centaine de salles de cinéma en activités (170 salles en 1998). Aujourd’hui changement de donnes ; alors que les salles de cinéma disparaissent chaque jour que le bon Dieu fait, les écoles de cinémas fleurissent et pullulent… « Si elle ne coule pas, elle tarit » dit un proverbe amazighe : il y a plus  d’ « écoles » de cinéma que de salles de cinéma. On est passé de la disette à l’abondance. Et l’offre en matière de formation pour le cinéma et l’audiovisuel connaît une véritable inflation non sans un certain désordre et une certaine confusion.  A Casablanca, au célèbre quartier commerçant Deb Omar, il y a les Chinois et les écoles de cinéma…On ne compte plus le nombre de « monteurs » et de « cadreurs » qui arrivent chaque année sur le marché et de plus en plus d’assistants à la réalisation, si ce n’est de réalisateurs !
Il faut souligner à cet égard que le vide laissé longtemps par l’absence d’une grande institution publique de formation en la matière a ouvert la voie à toutes formes de spéculations, le privé n’y étant pas allé de main morte. Conçu et mis en projet avec montage financier et programme pédagogique, l’Institut supérieur des métiers du cinéma a mis plus de dix ans pour voir finalement le jour dans une version largement formatée par les desiderata des fonctionnaires du ministère de la communication et loin des ambitions d’antan. L’ISMAC, a donc finalement vu le jour en septembre 2013 ; une belle initiative qui arrive tard, très tard  dans un paysage largement saturé avec la multiplication des circuits de formation et des intervenants. A commencer par un opérateur historique la formation professionnelle qui dispose d’une grande variété de cursus  jouissant globalement d’une bonne réputation professionnelle. Le privé qui a vu arriver des formations hybrides confondant cinéma et télévisions ; le ministère de l’éducation nationale avec les BTS (Bac + deux ans)  et les facultés des lettres qui ont tenté de redorer leur blason en multipliant des propositions de formations diplômantes en audio-visuel. Et puis il y a le cas de figure de l’ESAV de Marrakech qui a un statut particulier (initiative  privé mais fonctionnant à but non lucratif et qui est venue combler un vide en matière de formation pensée et construite dans les normes académiques et universitaires. 

Il nous semble que l’arrivée de l’ISMAC doit amener une nouvelle réflexion sur les processus de formation pour le cinéma. Les universités devraient revenir à leur mission initiale ; former à la culture cinématographique et non délivrer des diplômes de réalisateurs ; encourager et promouvoir la culture cinéphile, la sociologie du cinéma, l’esthétique, l’histoire du cinéma… dans un enseignement transversal qui implique tous les départements des études en sciences humaines. Le cinéma marocain a besoin de chercheur et de producteur de discours…sur son discours !

vendredi 26 septembre 2014

Brahim ou le collier de beignets

Brahim de Jean Fléchet


Brahim ou le collier de beignets est un  film de 1956, sorti en 1957, produit par le CCM et réalisé par Jean Fléchet. C’est le premier film à avoir représenté le Maroc dans une manifestation cinématographique internationale et non des moindres,  puisque Brahim a été choisi en 1957 par le ministère de l’information de l’époque de répondre à l’invitation du festival de Berlin. « Brahim » y a été projeté et a reçu un accueil public et critique élogieux. On rapporte que lors de la réception officielle qui a suivi la projection du film, l’ambassadeur de la France s’est retiré pour signifier son désaccord avec le film qui a omis de citer « la mission civilisatrice de la France au Maroc ».
Le film est en effet un hommage à un pays qui retrouve sa souveraineté, le titre en arabe est explicite dans ce sens, « Début et espoir » ! Ce n’est pas un film de propagande même s’il est émaillé de réflexions enthousiastes  sur le nouveau départ du pays. C’est un mélodrame tout imprégné de l’esthétique néoréaliste. La scène du prégénérique met en situation le récit qui vient et nous situe à la fin du ramadan de l’année de l’Hégire 1376 (qui doit correspondre au mois de mai 1956). Les préparatifs vont bon train pour la rupture du jeune avec l’image du canon que l’on charge montée en parallèle avec les images de l’attente du moment qui annonce la fin du jeûne et la fin du mois sacré. Le discours en voix off met en parallèle cet événement heureux l’aïd avec l’avènement d’une nouvelle ère, celle « de la liberté et de la résurgence » pour reprendre le jargon de l’époque repris par le commentaire dans une élocution très solennelle. Une emphase qui contraste avec les images sobres en noir et blanc signé du chef opérateur Ghislain Cloquet. Tout un discours moralisateur sur les vertus du ramadan accompagne l’entrée en lice des personnages tantôt réalistes, des images de gargsote populaires tantôt incarnés par des comédiens. On découvre ainsi, entre autres Hassan Skalli en jeune homme accompagné d’un enfant. Il lorgne du côté du marchand de beignets dans une image qui n’est pas sans rappeler les textes « ethnographiques » d’Ahmed Sefroui  dans sa description de l’ambiance de la Médina. La caméra suit le jeune homme lui conférant ainsi le statut de protagoniste ; c’est lui, Brahim qui donne son titre au film et les beignets passent pour un « plant », c’est-à-dire un signe récurrent qui jouera un rôle dans la suite du récit.  Le coup de canon lance le titre du film et le générique où nous retrouvons Hassan Skalli et une pléiade de noms dont notamment la jeune comédienne Fatima Abdelamlek, Hammadi Amor, Bacir El Alj, Larbi Doghmi, Tayeb Essdiki, Brahim Ouazzani…Le scénario est de Jean Pereau, écrivain français proche des nationalistes marocains et ami de Jena Fléchet ; les dialogues signés Brahim Sayeh et Ahmed Elal. La musique est composée par Abderrahim Sekkat. Tayeb Essediki est cité également comme conseiller artistique. Pour l’essentiel c’est une équipe rodée ayant déjà travaillé avec le réalisateur dans une série de films-sketches puisés du folklore marocain. La photo, rappelons-le,  a été confiée à Ghislain Cloquet qui venait de travailler avec Jacques Becker et sera un futur lauréat de l’Oscar avec le film Tess de Raman Polanski.
Le récit met en place un jeune homme, portefaix, un coolie mais qui ne trouve pas de travail à l’image de ses nombreux collègues. Une image dans le style du montage dialectique le montre face à des camions de messagerie. Ce contraste entre le nouveau qui s’installe et l’ancien qui agoniste constitue la trame du film. Une structure dichotomique qui oppose la médina à la ville nouvelle, la machine au travail manuel, le bien et le mal. Brahim est sans cesse confronté à des sollicitations contradictoires (la tentation de verser dans la somnolence et le jeu de cartes) ; la rencontre avec la jeune fille donne à son personnage une dimension éthique ; la rencontre se fait près de la source d’eau. L’eau que nous retrouvons à plusieurs reprises : la mer et le ciel ouvrent le film. Et c’est surtout l’eau du bain qui va renforcer l’image de la renaissance et du nouveau départ. Les porteurs vont décider en effet de sortir de leur léthargie et de rejoindre les camps de travail lancés par le gouvernement. Avant, ils passent au bain mort se faire une toilette, offrant l’une des premières images d’un bain maure dans le cinéma marocain. On les voit ensuite traverser la ville nouvelle quittant définitivement la marge de la ville où ils passaient leur journée dos au mur.



mardi 23 septembre 2014

Une feuille dans le vent de Jean-Marie Teno

Filmer la mémoire

Bakrim et J.-M. Teno à Yaoundé

Une feuille dans le vent de Jean-Marie Teno  a décroché au mois de juillet dernier, le Prix du meilleur documentaire lors du festival Ecrans noirs de Yaoundé. Ancien journaliste, J.-M. Teno s’engage dans le cinéma porté par des ambitions et surtout par un vaste projet, celui de témoigner ou plutôt d’interpeller les acteurs de l’histoire contemporaine de son pays ; d’interroger des pans entiers de la mémoire oubliée. De l’historien du quotidien, qui définit le journaliste, il passe au décryptage des images africaines en les réhabilitant à l’écran. Il est venu alors au documentaire en toute logique ; prolongeant son action de journaliste par d’autres moyens ; ceux du langage cinématographique ; ceux de l’image et du son ; les moyens  désormais incontournables de notre modernité, ceux qui étaient l’exclusivité de l’autre.  Il pose ainsi une question fondamentale, celle du regard, du point de vue, du montage…la caméra en effet n’est plus neutre, il participe d’une entreprise générale dont Teno fait son credo ; décliner un point de vue africain sur les archives et les images africaines ; entamer un travail de montage à partir du point de vue d’une mémoire longtemps ignorée voire tout simplement blessée, car amputée. Dans ses films, il aborde une thématique diversifiée, mais toujours ancrée dans un référentiel précis : social par exemple la problématique de l’eau ou sociétal et culturel / interculturel, avec les rapports à l’autre ; l’autre dans le temps, à savoir tout le legs ancestral et historique ou l’autre dans l’espace, à savoir « le blanc » et la question de l’altérité qu’il amène.
Avec Une feuille dans le vent, il s’agit justement  d’un retour sur un moment crucial de l’histoire contemporaine du Cameroun avec en filigrane cette interrogation qui en cache d’autres : que sont les héros de nos indépendances devenus ? Voire tout simplement : qu’avons-nous fait de nos indépendances ? Le film s’inscritalors dans cette double logique citoyenne et artistique.
A un premier niveau, le film est le récit de la vie, plus que tumultueuse, elle confine carrément à un destin  tragique, de la jeune Ernestine qui n’est autre que la fille de Ernest Ouandié héros du mouvement de libération nationale, leader historique de l’UPC (Union des populations du Cameroun) ; mouvement politique fondé en 1948 et qui a conduit le mouvement d’accès à l’indépendance. Sauf que Ernest Ouandié, éternelle rebelle, choisit à l’orée des années 60, la dissidence et rejoignit le maquis. Arrêté, il sera fusillé le 15 janvier 1971. Entre temps, il aura eu une fille, Ernestine qu’il ne verra jamais, de sa femme d’origine ghanéenne. Celle-ci avait choisi, dès le début des années 60, l’exil et de refaire sa vie. C’est Ernestine qui fera les frais de ce drame où se conjuguent destin individuel et destinées collectives. Elle sera abandonnée par sa mère à l’âge de 10 ans. Elle va souffrir le martyr lors de ces années d’errance sans cap.
En 1991, l’assemblée nationale du Cameroun  tente une réconciliation avec l’histoire du pays en réhabilitant la mémoire des hommes de l’indépendance. Ernest Ouandié sera proclamé Héros national…mais le mal est fait. Il demeure un paria, un fantôme condamné à l’exil. Sa fille, sortie de son drame personnel rentre au pays pour retrouver ses racines et retrouver la mémoire de son père constitutive de la mémoire du pays. Elle se heurtera à un mur fait de silence, de peur et de préjugés.
Jean-Marie Teno rencontre la jeune femme en 2004. La rencontre fut inopinée ; « je n’étais pas du tout prêt du point de vue strict de la production, à un tournage dans les normes » nous dit le cinéaste. Le matériel n’était pas disponible sur place. « Mais je ne voulais pas rater cette occasion et j’ai tourné alors avec le matériel dont je disposai ». Le cinéma comme la vie est fait de hasards, souvent heureux. Et les Américains aiment dire que si la fiction est l’œuvre du cinéaste, de l’auteur le documentaire est l’œuvre de Dieu…
C’est ainsi donc qu’avec un strict minimum Teno monte un dispositif de captation de la parole au diapason du sujet qu’il traite. Centré sur le discours de sa protagoniste, le film a recours rarement aux images d’archives pour contextualiser certains propos qui renvoient à l’histoire. Ernestine est au centre de l’image, au centre du récit. Filmée de face en légère contre-prolongée, regard à la caméra. Nul artifice de mise en scène ne vient surcharger le discours qui émane de cette voix qui parle au nom de l’histoire. De temps en temps, de légers moments de caméra rappellent  le dispositif d’énonciation. Le récepteur est impliqué par ce regard, par cette voix. Il est invité à un partenariat de sens. La logique temporelle du film respecte le rythme du récit oral émaillé de pause, de silences éloquents. La parole de la jeune femme émane d’un cadre  aux apparences fermées, le sujet est filmé dos au mur. Impression renforcée par les grilles de la fenêtre. Impressions seulement, car très vite le regard est orienté vers un hors champ visuel émanant du reflet sur les vitres de la fenêtre. Et surtout avec la présence d’un hors champ sonore très riche (bruits d’une cour de maison, de la forêt proche)) qui renvoie à la vie. L’espace de la parole qui semble être un enfermement est élargi par l’irruption de cet hors champ qui dit une forme de perspective, brisant l’étau que la grande histoire impose à l’histoire des gens simples. Le film en effet n’est pas un reportage sur un cas de figure, sur un exemple de victime. C’est essentiellement un travail de cinéma sur une mémoire blessée. Une proposition autour de la problématique : comment filmer la mémoire

A commencer par le titre ; il ouvre sur un horizon d’attente inédit pour « le genre » documentaire. En termes de réception, en effet, « une feuille dans le vent » neutralise en quelque sort l’effet documentaire au bénéficie d’une réception poétique. La fonction référentielle du titre est quasiment nulle et surtout ne renvoie nullement au sujet traité par le film qui ne parle ni de feuille ni de vent. Il s’agit bien au contraire du destin tragique d’une vie broyée par l’histoire. Ce faisant, il adhère à la tonalité du discours d’Ernestine qui use d’un langage métaphorique pour dire qu’une nation qui renie son histoire est comme une feuille dans le vent. Elle quitte sa tige et ses racines pour disparaître sans trace. 

Le proche et le lointain de Hassan Rachik

Le Maroc comme expérience anthropologique
Il y a beaucoup de clichés qui circulent comme vérité sur le caractère des uns et des autres : dans le jargon quotidien et loin des sphères scientifiques, on entend souvent des généralités sur les caractéristiques de l’une ou l’autre, des communautés composant une nation. Sur les Soussi, sur les Marrakchis…on lance des boutades comme des énoncés avérés. Ces productions ne sont pas cependant une exclusivité des plaisanteries du café de commerce ; elles finissent par contaminer le regard du chercheur qui vient appliquer sa grille de lecture à une société donnée. Ce chercheur très particulier – car formé dans un contexte socio-culturel précis et qui va porter et expérimenter sa science ailleurs sur une autre société -  s’appelle anthropologue. Il arrivé aussi que cet anthropologue retourne ses outils sur son propre terrain, celui de sa société. C’est sommairement résumées les problématiques que traversent et portent le parcours d’un anthropologue marocain de renommée internationale, Hassan Rachik dont nous présentons l’un des derniers livres, Le proche et le lointain, un siècle d’anthropologie au Maroc (Editions parenthèses, 2012, 270 pages).
D’emblée, l’ouvrage paraît austère, avec sa couverture sobre, son format relativement volumineux. Mais ce n’est qu’une impression. Un seuil de lecture qui renvoie à une rencontre inédite, du genre de celle qu’il aborde comme sujet. La rencontre avec le livre de Hassan Rachik est une mise en application d’une idée fondatrice qu’il développe dans son travail,  celle de « situation ethnographique ». Le travail de l’anthropologue est tributaire en effet de « la situation ethnographique », les conditions pratiques dans lesquelles se fait la rencontre, l’observation de la culture de l’autre…elle implique nous dit Hassan Rachik plusieurs dimensions : la durée, la maîtrise de la langue de l’autre. Comme avec les livres, c’est toujours un voyage. Et le livre, Le proche et le lointain, une fois ce seuil franchi, nous captive dans un récit passionnant car porté par une qualité intrinsèque : un style limpide et didactique. La langue est académique sans être rébarbative. Hassan Rachik est l’un de nos plus brillants chercheurs en sciences sociales, professeur à l’université Hassan2 de Casablanca depuis 1982 ; ses travaux connus par leur rigueur méthodologique et leur consistance intellectuelle lui ont assuré une renommée internationale et au Maroc l’une des références les plus crédibles quand il s’agit de décrypter le « social » quand il devient « sociétal » ou politique (cas du pouvoir symbolique ou de la religiosité). Homme de recherche et de production théorique, Hassan Rachik est un cinéphile de la première heure, à l’époque de l’âge d’or des ciné-clubs (il était une des figures du ciné-club Al Azaim à la  mythique salle Kawakib du Boulevard Fida de Casablanca).
Il aime se présenter lui-même comme « un anthropologue citadin qui s’intéresse au monde rural ». Son travail est marqué, avec les précautions d’usage à l’égard de tout schématique, par deux phases. Une phase dite « du terrain » où il a beaucoup travaillé dans le haut Atlas et dans les régions de Zemmour. Notamment autour des problématiques concernant l’interprétation des rituels sacrificiels et les changements sociaux en milieu rural et nomade.
Et une phase de relecture critique de la production anthropologique issue du regard et de la science de l’autre, à savoir les anthropologues occidentaux (Américain, Anglais, Français…) qui se sont intéressé à ce « mystérieux Maroc ». Il a cerné son sujet autour de trois périodes cruciales, précoloniale, coloniale et postcoloniale… avec la promesse de prolonger cette interrogation aux productions qui ont continué à étudier le Maroc jusqu’aux années 80 du siècle dernier.
Dans une introduction dense mais d’une clarté tonique, Hassan Rachik brosse le cadre de référence qui va lui permettre de « lire » les  travaux de ses collègues anthropologues, avec notamment un schéma interprétatif fondé autour de la situation ethnographique. Celle-ci se présente sous des formes très variées et va lui permettre de cerner son corpus autour d’une dizaine de noms, d’auteurs, dont certains sont des figures emblématiques de l’anthropologie marocaine : Charles de Foucault… Jacques Berque, Waterbury…Une approche intensive portée par la devise empruntée à Westermarck : « better much little than little about much » !
La diversité des situations ethnographiques est illustrée par le parcours des anthropologues choisis ; ces explorateurs, voyageurs ou fonctionnaires coloniaux ont abordé le Maroc à travers plusieurs prismes. Rachik les présente sans jugement de valeur sur une qualité spéciale pour une situation ethnographique particulière. Cela va du séjour longue durée avec le sujet observé (cas de Jacques Berque) à celui qui analyse à partir de l’écoute lointaine et sur la base de l’écoute de témoins ( Mouliéras qui analysa le Rif à partir d’une série d’entretiens réalisés à…Oran !). En Cela Rachik est fidèle à une ligne de conduite théorique qui refuse les dogmatismes et les apriori. Une démarche qui nous semble d’une actualité transversale, transposable à d’autres champs : «   je me méfie toujours des oppositions binaires et des positions extrêmes…Je suis pour une généralisation conditionnelle, c’est-à-dire celle qui explicite les conditions sociologiques et culturelles de sa pertinence » !



vendredi 19 septembre 2014

l'image de la femme dans le cinéma de femmes

Figures féminines radicales

Quand des femmes filment des femmes, au cinéma, cela ouvre-t-il sur des images spécifiques ? En d’autres termes, l’image de la femme dans le cinéma fait par des femmes se distinguent-ils par des spécificités que l’on ne retrouve pas dans les films portés par un regard masculin ? On peut lancer une boutade pour résumer autrement la problématique : y a-t-il des personnages féminins méchants dans des films réalisés par des femmes ? Certainement. Mais la question ne se réduit pas au système des personnages qui fondent une dramaturgie mais touche à l’ensemble de l’esthétique. Le rendu d’un directeur de photo dirigé par une femme se distingue-t-il de celui dirigé par un homme ? Y a –t-il une touche féminine dans le traitement de l’image de la femme ? Très tôt la question a été abordée.
 Et la réponse qui nous vient de l’histoire du cinéma nous dit que le regard le plus chargé d’empathie pour la femme est signé…de Bergman, Fellini, Truffaut…des hommes qui ont si bien rendu le moment intime ou tout simplement si bien  éclairer un visage féminin d’une manière sublime et qui transcende la distinction de genre (Inoubliable gros plans de Renée Falconetti incarnant Jeanne d’Arc de Dreyer). Margareth Von Trotta, la cinéaste allemande, l’une des cinéastes qui ont su justement adopter un tempo original quand il s’agit de filmer des causes féminines avoue sa dette à…Bergman qui l’a mise sur la voie de la création artistique : « "Ce cinéaste est mon maître absolu. C’est vraiment avec ses films que je me suis éveillée au cinéma et que mon désir d’en faire a pris forme ». En 1983, elle obtient la consécration suprême à Venise pour Les années de plomb où elle met face à face deux sœurs, l’une journaliste, l’autre terroriste. « Deux personnages peuvent être nécessaires pour décrire une seule personne. Pour faire voir toutes les contradictions d’une personnalité, on peut la dédoubler au cinéma ( …) C’est un thème classique de la littérature romantique », précise-t-elle. En termes de choix esthétiques, c’est dans le rythme et le montage des séquences qu’une femme ressent et expriment le rapport au temps : filmer le gestuel d’éplucher des pommes est ainsi un choix de montage qui dit un regard.
Au Maroc, deux films offrent une synthèse magnifique de la gestion du temps féminin dans un cinéma féminin. C’est L’enfant endormi de Yasmin Kessari et Sur la planche de Leila Kilani. Deux longs métrages parmi les plus forts de la filmographie marocaine. En fait j’aurai aimé aussi y ajouter un court métrage fort prometteur, Leur nuit de Narrimane Yamna Faqir (2013). Trois films, trois figures féminines radicales : Halima (Rachida Brakni) ; Badia (Sofia Issami) et Rkya (Amale Alatrach)
Badia, la protagoniste de Sur la planche a fait irruption dans notre paysage cinématographique comme une météorite. A elle seule, elle est tout un programme dramatique et esthétique. Avec ses trois autres amies, elles nous offrent une image d’une rare violence, donc d’une rare vérité sur l’état de notre fausse modernité (il y a un trafic de Smartphones en arrière fond du drame) ;  dans un prégénérique lapidaire, elle se charge  d'énoncer, face caméra, en gros plan, leurs cinq commandements : "Je ne vole pas : je me rembourse. Je ne cambriole pas : je récupère. Je ne trafique pas : je commerce. Je ne me prostitue pas : je m'invite. Je ne mens pas : je suis déjà ce que je serai. Je suis juste en avance sur la vérité : la mienne."
Yasmine Kessari, Laila Kilani, Narrimane Faqir, trois regards, trois mises en scène du regard dans un temps propre. Un temps féminin comme le décrit Barthes dans Fragment d'un discours amoureux. Un temps immobile ou répétitif.
 Le temps immobile de l’absence dans L’enfant endormi ; Zineb et Halima confrontées à la séparation (conséquence de l’immigration masculine) sont filmées au quotidien. Le corps reclus face à un espace désertique. La caméra de Yasmine Kessari capte les détails qui disent la blessure intérieure avant que le corps déclenche sa propre révolte (les crises de Halima)
 Le temps dichotomique de Badia dans Sur la planche. Une vie en deux temps : le temps du jour, à l’usine, en plan large parmi les crevettes ; le temps de nuit, celui de la ville western, en plan serré.  Et enfin le temps dilaté et brisé par la rupture de Rkia, l’héroïne du court métrage Leur nuit où nous retrouvons une Amale Al Atrach comme jamais filmée. Un regard féminin ?
Mohammed Bakrim



cinéma marocain: nouvelle donne

Mutations
…Et pendant ce temps là, le cinéma continue. Le cinéma marocain continue de creuser son sillon, en effet, malgré un contexte institutionnel pour le moins flou…à ne pas comprendre dans le sens du flou artistique, mais plutôt politique. Oui carrément. C’est désormais un secret de polichinelle de dire que depuis au moins deux ans, le cinéma subit, par défaut, une sorte de blocage tendant à perturber son élan. Les initiatives tapageuses qui ont été lancées sous prétexte de régulation du secteur ont été une manière de rétrograder de vitesse, comme on dit pour un véhicule. Le silence officiel sur la question des salles de cinéma qui se réduisent à vue d’œil est une position politique implicite : pour ne pas attaquer le cinéma frontalement, après l’échec et le ridicule  des tirs d’artillerie idéologique à partir de concepts stupides tel l’art propre, on cherche pernicieusement à étouffer le cinéma par en bas, en fermant les yeux sur la fermeture des salles ; rêvant de se réveiller un jour avec un pays, pâle copie de « da3ichland », sans cinéma et sans imaginaire ; sans rêve et sans évasion…sauf que le cinéma est une espèce mythologique ; elle simule la disparition pour mieux apparaître. Tel le phénix de la légende… 
Le cinéma, encore une fois, continue. En opérant une mutation en profondeur. Un nouveau cinéma marocain est en train d’éclore, d’advenir. Un cinéma nouveau porté par une nouvelle génération. C’est la mutation stratégique qui va transformer radicalement le paysage. C’est une hypothèse facilement vérifiable par un chercheur objectif. Or le discours d’escorte du cinéma se contente de ressortir à chaque occasion sa litanie sur le quantitatif et le qualitatif…alors qu’un changement qualitatif est en passe de devenir la donne majeure et la caractéristique fondamentale de la profession cinématographique au Maroc. Plusieurs indices vont dans ce sens, en premier lieu l’éclipse de toute une génération, celle des années 60 et 70 au bénéfice de nouvelles générations arrivées dans le sillage des années 90. On peut partir d’un paramètre institutionnel qui malgré les limites que l’on peut y déceler reste un indicateur essentiel dans ce sens. Il s’agit d’une lecture transversale des palmarès accumulés du festival national du film. Si l’on prend le critère du Grand prix du FNF sur les dix dernières années, on relève des constatations qui confirment l’hypothèse de la prise du pouvoir symbolique dans la profession du cinéma par une nouvelle génération. Quels sont les noms que nous retrouvons en tête du podium depuis 2005 ? (Date à partir de laquelle le festival va s’institutionnaliser en s’installant définitivement à Tanger). Yasmine Kessari, Ahmed Maanouni, Nabil Ayouch, Mohamed Mouftakir, Hakim Belabbès, Laila Kilani, Nordine Lakhmari, Kamal Kamal. Si on élargit le podium à la deuxième place, on verra l’apparition des noms de Faouzi Bensaïdi, Hicham Lasri, Mohamed Achaoer….en d’autres termes, la dernière apparition d’un représentant des premières générations remonte à 2007 avec Ahmed Maanouni avec son titre prémonitoire, Cœurs brûlés !
Le palmarès n’indique pas forcément les tendances réelles ; il obéit parfois à des contraintes contextuelles…mais il reste un indice conforté par le suivi de la réalité du terrain. Dans l’autre « palmarès » celui du guichet, deux noms émergent : Brahim Chkiri et Mohamed Ahed Bensouda…

 Autant d’éléments structurels qui autorisent à penser qu’une génération est en train de décrocher en termes d’expression d’imaginaire et de renouvellement esthétique. Déjà le court métrage est en train de réussir sa mutation avec les grandes lignes qui s’installent. Et pour le long métrage, le prochain rendez-vous du festival national va encore accentuer l’expression de cette mutation. Il s’agit d’être attentif aux signes annonciateurs des temps nouveaux.

dimanche 14 septembre 2014

Regain

Les ciné-clubs, le retour?
le jury Reggab

La fédération nationale des ciné-clubs vient d’organiser la sixième édition de son université d’été. Un rendez-vous qui a tenu globalement ses promesses et a répondu aux attentes de ses initiateurs, notamment le bureau fédéral fier de présenter un premier bilan chiffré avec le nombre de participants qui avoisinent la centaine représentants une trentaine de ciné-clubs. Une fierté toute légitime, car la FNCCM revient de loin. Créée en 1973, cette structure a forgé sa réputation  par son indépendance et par son dynamisme ; elle a connu ses années de gloire durant la décennie des années 70 pour voir son déclin entamé avec les années 80 « le moyen âge » de la culture…pour vraiment se contenter de végéter, vivoter les années suivantes. La crise était complexe. Elle était à la fois dans le sujet et dans l’objet. La fédération des ciné-clubs laminés par des querelles intestines n’avaient pas vu ou n’avait pas pu voir venir les métamorphoses qui ont touché son champ d’action.  A la fois en amont puisque l’économie du cinéma lui-même a imposé de nouvelles règles de circulation des films et en aval avec l’arrivée de l’ère de la consommation « domestique » des images. Le cinéma est passé de la sphère publique, lieu de prédilection du spectateur cinéphile et potentiel membre du ciné-club, à la sphère privée. Le cinéphile n’est plus ce citoyen impliqué dans sa ville, mais un individu soucieux de son confort « tribal ». Le Maroc était entré dans l’époque postmoderne, réticente à toute pensée globalisante et prétendant à la totalité. Caractéristiques majeures du discours cinéphile de la belle époque.
Aujourd’hui, après de laborieuses expériences qui ont permis – au mieux - de sauvegarder la structure, nous assistons à un regain (pour reprendre le titre d’un film de Marcel Pagnol, diffusé justement dans le cadre des ciné-clubs) d’activités et un dynamisme venant d’en haut principalement. Car à la base, la pratique des ciné-clubs est ramenée le plus souvent à l’organisation de rencontres épisodiques voire se contentant d’une manifestation cinématographique annuelle drainant quelques stars locales. Il est révolu le temps du rituel dominical de la séance hebdomadaire qui réunissait les adhérents, ponctuels, attentifs et désireux de découvrir le monde (et rêver de le changer) à travers son cinéma. D’où une conséquence majeure qui caractérise le paysage cinématographique, le repli de la culture cinéphilique, aucune structure n’étant venu combler le vide laissé par les ciné-clubs. C’est le déficit que tente de combler le bureau de la FNCCM en multipliant les rencontres thématique et surtout en annonçant son intention de faire de son université d’été son activité phare, son emblème.
La sixième édition a connu un succès certain malgré les aléas traditionnels de la logistique. C’est la première tache à laquelle il faut s’astreindre désormais : assurer des conditions de projection optimales pour les films programmés; l’éducation du regard inscrite dans les gênes d’un ciné-club passe par là ! C’est la condition sine qua none de la réussite d’une rencontre de cinéphiles. En outre, il nous semble que la programmation générale souffre d’une surcharge thématique…cela donne l’impression d’une véritable boulimie ; comme pour rattraper  le temps perdu. L’organisation d’un concours de courts métrages au sein de l’université crée une ambiance de compétition incompatible avec l’esprit d’une université d’été. Pourquoi ne pas consacrer au concours Reggab du court métrage, une plage propre dans le calendrier et préserver le caractère strictement cinéphile de l’université d’été. Cela aura des répercussions sur l’économie générale du programme : le master class et la table ronde avaient pâti du manque de temps. Lançons un débat à ce propos !

mercredi 10 septembre 2014

Ma solidarité et ma sympathie à Najat et Munir

A la 77ème minute du match officiel, qualificatif pour l’Euro 2016, entre l’Espagne et la Macédoine, le jeune Munir Haddadi a fait son entrée sur la pelouse du stade de Valencia portant le maillot numéro 19 des couleurs de la Roja. C’était l’événement dans l’événement. L’Espagne a eu gain de cause deux fois. Elle a brillamment remporté le match en s’imposant par un score large (5-1) et elle a réussi à capter l’itinéraire du jeune prodige barcelonais en le connectant définitivement au destin de l’équipe espagnole. Le jeune Munir paraissait tout ému en enfilant son maillot et en écoutant les dernières consignes de son coach, le vétéran Del Bosque. Sa prestation relevait d’une simple formalité, il n’était pas franchement, ce soir là, attendu en termes techniques. D’ailleurs, il était entré dans une configuration tactique où il était en concurrence avec Silva et son collègue du Barça, Pedro.  L’enjeu véritable de son entrée en scène relevait de l’extra-footballistique. C’était le symbole qui était consacré. Un passage. Une inscription dans une nouvelle identité. Un choix qui en dit long sur les nouveaux rapports identitaires qui caractérisent le monde issu de la globalisation.  Munir était déjà espagnol ne l’oublions pas (il est né à Madrid) ; mais ce soir-là il a donné à cette appartenance une nouvelle légitimité inspirée de l’esprit du temps.
Face à cette image, ma réaction était mitigée. Double en fait. De la frustration certes, de ne pas voir ce joueur prometteur venir renforcer le nouvel élan des « vertd et rouges » mais de la fierté aussi car on continuera de dire à chaque prouesse de ce jouer talentueux, « Munir d’origine Marocaine ». Sur cette voie nous lui souhaitons tout le succès du monde ; qu’il devienne le Zidane des nouvelles générations. Il sera toujours quelque part marocain ; et cela rien ne lui enlèvera. Evitons donc les règlements de compte stupides et haineux ou les jugements hâtifs comme qui ceux qui évaluent son geste à l’aune du patriotisme. Il mérite tout le respect et l’estime qui siéent à sa valeur, à sa prestation et ses comportements futurs.
De l’autre de côté des Pyrénées, c’est une « Marocaine » cette fois qui déchaîne des réflexes quasiment haineux et belliqueux. C’est la ministre française, d’origine marocaine, de l’éducation nationale, Najat Belkacem. Elle a subi depuis na nomination une avalanche d’attaques, d’insultes, de  rumeurs… de nature sexiste, raciste, misogyne. On est allé jusqu’à falsifier des documents officiels de son département pour lui faire attribuer des positions que ne sont pas les siennes.
 « Elle est attaquée et injuriée sous divers angles : pour ce qu’elle pense, pour ce qu’elle a fait en tant que ministre des droits des femmes, pour ce qu’elle est, une jeune femme française d’origine marocaine. Sont ainsi visés ses idées, son action, son parcours, sa personne.
Nous tenons à affirmer notre entière solidarité avec Najat Vallaud Belkacem, conscientes qu’à travers elle, est aussi gravement mis en cause ce que doit être l’égalité républicaine, c’est-à-dire l’égalité entre les sexes, entre les origines, entre les personnes. »
C’est ce qu’on peut lire sur une pétition qui circule pour lui témoigner soutien et solidarité. Nous faisons nôtre cette démarche à l’égard de ces nouveaux symboles ; ils contribuent à réécrire autrement la logique d’appartenance à un territoire et expriment la dynamique identitaire qui forge, dans la douleur certes, la configuration d’un nouveau monde.
Mohammed Bakrim


vendredi 5 septembre 2014

les ciné-clubs en conclave à Mohammedia

Recherche cinéphilie désespérément



La fédération nationale des ciné-clubs (FNCCM) réunit son université d’été  du 4 au 7 septembre dans la ville côtière de Mohammedia. Un espace porteur d’inspiration certaine puisque la ville n’est pas seulement l’expression de la modernité marocaine mais à une tradition historique, celle d’abriter des rencontres décisives y compris dans l’histoire des ciné-clubs avec notamment un célèbre stage au début des années 70 animé par N. Sail et Abdellah Laroui !!!!
C’est d’ailleurs face à ce lourd héritage que la FNCCM cherche toujours un nouveau démarrage. Les choses ont évolué et les ciné-clubs ont connu une dure période de traversée de désert. Situation générant un nouveau paradoxe : au moment où la production cinématographique nationale connaît un réel dynamisme, la cinéphilie a pratiquement disparu de l’espace public. Des générations entières arrivent aujourd’hui à la pratique cinématographique voire à la profession carrément par le seul biais de la technologie sans background culturel !
C’est certainement le souci et plus sûrement encore l’objectif implicite de ce retour à la vie de l’activité des ciné-clubs, du moins par le haut,  à savoir par la redynamisation de l’action de la FNCCM. La formule de l’université d’été a été initiée en 1993, elle en est aujourd’hui à sa sixième édition. Le programme proposé aux animateurs invités est riche et diversifié même s’il pose des questions de « pertinence » au sens pédagogique du terme.
L’une des séquences phares de cette édition est l’hommage rendu à des figures historiques des ciné-clubs. Saad Chraïbi, l’un des rares cinéastes en exercice à être l’émanation des ciné-clubs ; pendant longtemps il a animé et dirigé un ciné-club et a été membre fédéral. Hassan Ouahbi, une figure de la culture cinématographique à Marrakech, véritable mémoire vivante du cinéma marocain. Discret et serviable, il est de toutes les rencontres où l’on défend le cinéma à l’école. Il anime et dirige un ciné-club scolaire qui est une vraie réussite. Mostafa Alouani qui a suivi la voie royale qui mène des ciné-clubs (notamment à Casablanca)  à la critique cinématographique. Travaille généreusement et avec passion  pour propager la culture cinématographique dans le milieu associatif.
Le programme de l’université d’été comprend également des séances-ciné-clubs, une master class autour de Saad Chraïbi, animée par Youssef Ait Hammou ; un concours de courts métrages dédié à la mémoire de Mohamed Reggab. Le jury de cette édition est d’ailleurs présidé par son fils, le cinéaste prometteur Younes Reggab.
Cédant à une pratique qui contamine toutes les manifestations de cinéma au Maroc, la FNCCM a programmé également des ateliers de « formation » au montage numérique, à l’écriture de scénario à la direction  photo…d’où la question de la pertinence que nous n’hésitons pas à poser : le rôle d’un ciné-club consiste-t-il à former à la technique du cinéma ou à initier à la culture du cinéma ? Le rôle d’un ciné-club est de promouvoir la cinéphilie, d’autant plus dans un contexte où la cinéphilie bat de l’aile et où les espaces dédiés au discours cinéphilique se réduisent comme peau de chagrin. En cédant à la mode du « tout technique » le ciné-club faillit à sa mission. Il aurait été plus pertinent me semble-t-il de faire revivre la mémoire cinéphile en demandant à Hassan, Saad et Mostafa de présenter au jeune public présent le film qui les a marqués dans leur longue carrière d’animateur de ciné-club.
Un ciné-club ne peut se substituer à une école de cinéma ; au contraire un ciné-club « civil » peut compléter le rôle d’une école de cinéma en remplissant les blancs et les trous de mémoire d’une formation technique. N’a-ton pad dit que « là » on forme des assistants à la réalisation et « ici » on forme des cinéastes !
M.B


Albachado de Hassan Aourid

  L’intellectuel et le pouvoir ou la déception permanente ·          Mohammed Bakrim «  Avant d’être une histoire, le roman est une in...