Le rêve parce que la vie continue
La ville ocre accueille aujourd’hui la 14ème
édition du festival de Marrakech. Malgré un calendrier cinématographique
international chargé et une rude concurrence entre plusieurs manifestations cinématographiques
qui se bousculent en un laps de temps réduit, notamment dans notre
sous-région, le Caire à peine achevé,
Carthage prend le relais et Dubaï démarre la semaine prochaine…le festival de
Marrakech a réussi à honorer son contrat et établir une programmation
prometteuse à travers ses principales rubriques. A commencer par la sélection des films. Cette
année, 87 films, venant de 22 nationalités, ont été retenus pour les
différentes sections du festival à savoir la compétition officielle (15 films),
Coup de cœur, hors compétition, les films des hommages et du pays invité. C’est
un très bon chiffre qui donne au festival une dimension humaine loin de la
boulimie qui caractérise certains festivals, Toronto, plus de 300 films au
programme ; avec 87 films, Marrakech place la barre à un très bon niveau
permettant à un critique sérieux ou un cinéphile assidu de visionner une bonne
trentaine de films avec une moyenne de trois à quatre films par jour.
Fidèle à une tradition
qui s’est avérée avec la pratique comme fructueuse, le festival a sélectionné
13 films relevant de « première œuvre » dont huit en compétition
officielle. C’est une tendance qui
marque désormais le festival de Marrakech, devenant une plate-forme de
lancement de nouveaux talents : beaucoup de cinéastes ayant démarré à
Marrakech ont confirmé par la suite, leur immense talent, la palestinien Hani
Abou Assad (Star internationale avec ses
films Paradise Now et surtout
Omar), le Libanais Ziad Doueri
(Grand prix à Marrakech avec L’Attentat).
Des films de grande qualité sont également à l’affiche dans la section Coup de
cœur dédiée notamment à des films marocains présentés en exclusivité à
Marrakech mais aussi avec des films qui ne manqueront pas de susciter l’intérêt
des festivaliers et des cinéphiles ; la section hors compétition est très
riche cette année avec des films estampillés grand public dont certains sont
candidats à l’Oscar.
Le pays invité cette année, le Japon est une véritable cerise
sur le gâteau ; c’est une grande nation de cinéma qui sera présentée au
public du festival à Marrakech avec une rétrospective donnant un large aperçu sur la richesse et la
vitalité de ce cinéma qui a donné au cinéma mondial de grands maîtres et de
vrais chefs-d’œuvre. Nous aurons ainsi à (re) découvrir toute une panoplie qui
va des classiques à la toute nouvelle génération : les maîtres
historiques : Ozu, Mizogushi, Naruse, Akira Kurosawa, Shohei Imamura, et
des représentants du cinéma d'aujourd'hui reconnu internationalement et incarné
par Kore-eda, Kyioshi Kurosawa, Naomi Kawase, Nobu Sawara et Ryuishi Hiroki.
La composition du jury a toujours constitué un des points
forts de Marrakech, cette année n’a pas dérogé à la règle avec une présidente
qui est une grande dame du cinéma
mondial, la comédienne Isabelle Huppert ; star de l’écran qui allie
charme, intelligence et regard malicieux sur le monde. Ses interviews de presse
sont d’une grande consistance sémantique. Isabelle Huppert n’a jamais accepté
de présider un festival en dehors de Cannes ; sa présence à la tête du
jury de Marrakech 2014 est une véritable
première internationale. Elle est accompagnée de personnalités prestigieuses
venant des quatre coins de la planète dont le marocain Moumen Smihi, le digne
représentant du cinéma d’auteur marocaine et arabe.
Les autres rubriques phares du festival, les masterclass, la
compétition Cinécole, les hommages à des personnalités marocaines et
internationales contribuent à étoffer une programmation riche et diversifiée. Une
programmation qui réussit un dosage pertinent entre les composantes qui forment
l’identité du festival : un festival glamour, cinéphile, professionnel et
citoyen. Citoyen car le festival de Marrakech initie des actions ouverte sur
des populations ciblées comme les non-voyants contribuant ainsi doublement à la
santé du regard et à son éducation. Il reste également sensible à son
environnement et à ce qui marque l’actualité. En offrant une programmation de
qualité, il contribue ainsi à maintenir le désir de rêve dans un environnement
de plus en plus dur et complexe. Ses images de vie, d’amour, de tolérance…
offrent un contre-champ optimiste aux images sinistres des différents JT. C’est
en quelque sorte un patrimoine qu’il porte dans son code génétique ;
n’est-il pas né un septembre 2001 quand l’horreur a fait irruption dans
l’horizon. Sa première édition maintenue malgré les images de la tragédie a
donné le ton. Claude Lelouch en a
rappelé la quintessence lorsqu’il a souligné déjà : « le Festival de Marrakech est très important
surtout depuis que le cauchemar a déclaré
la guerre au rêve…Ici à Marrakech, le rêve gagnera la deuxième manche ».
Aller à Marrakech aujourd’hui comme en 2001, c’est persister dans la défense de
la vie et le droit au rêve…car, surtout, après la pluie, il y a le beau
temps !
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