vendredi 31 octobre 2014

De quelques paradoxes du cinéma marocain

De quelques paradoxes…au cinéma
Ce n’est pas le moindre paradoxe marocain. Le cinéma en effet, n’arrête pas d’en fournir. Allez, prenons un dernier exemple que nous offre l’actualité toute chaude. Il y a  un « festival » à Rabat qui se tient sous le label de cinéma d’auteur et qui ne présente cette année aucun film marocain en compétition officielle. Aucun film marocain ne mérite « le Prix Hassan 2 » ? Cela rappelle le tennis et le sport équestre mais c’est bien l’intitulé,  très marketing année 70, du festival du cinéma d’auteur de Rabat. Aucun film marocain au moment même où la cérémonie d’ouverture de cette édition a vécu une première insolite, la présence du ministre du département de tutelle (Le hasard a voulu que ce soit un film turc qui était au programme cette soirée là !). Insolite car c’est un fait rarissime. Non seulement il était présent mais a cautionné le festival en prenant la parole lors de la cérémonie d’ouverture ; ce qui n’est pas encore une fois le moindre paradoxe marocain : voilà un festival qui se dit indépendant et qui est supposé promouvoir un cinéma d’auteur indépendant  qui choisit de démarrer, fait rarissime dans la pratique cinéma marocaine, sous le signe du discours officiel. Discours ministériel qui n’a pas manqué de mettre en exergue la bonne santé actuelle du cinéma marocain…état de chose que ne reconnaît pas le festival dans sa sélection officielle puisque aucun film marocain n’a été inscrit. Allez-y comprendre quelque chose ! Pauvre cinéma d’auteur…instrumentalisé au service de pouvoirs occultes ou du moins extra-cinématographiques !
Dans la série des paradoxes, prolongeons les exemples avec les derniers chiffres publiés par le CCM sur le box office arrêté au trente septembre dernier. Saluons  encore une fois cette initiative louable de mettre à la disposition des observateurs du paysage cinématographique des données fiables sur l’état des lieux. Aujourd’hui nous avons les chiffres concernant les neuf premiers mois de l’année en cours. Ils sont porteurs de sens à plusieurs niveaux. Ils mettent en avant d’une manière flagrante un autre paradoxe ; cette visibilité institutionnelle et statistique du cinéma devient une pratique courante au moment même où le cinéma devient invisible dans l’espace social. Avant en effet de lire et de décrypter les performances réalisés au niveau du guichet par tel film ou tel autre, il faut croiser ces chiffres avec une réalité structurelle ahurissante : le cinéma au sens social du mot n’existe plus que dans neuf villes !!!!! La trentaine de salles encore en activités sont cantonnées dans un espace géographique très réduit. C’est pour dire que les chiffres obtenus par les films marocains auraient été d’une autre dimension dans un autre environnement.

Que nous disent ces chiffres ? Ils confirment une tendance installée maintenant depuis une décennie, celle de voir des films marocains monopoliser les premières places du box office. C’est le mélodrame de Ahed Bensouda, Derrière les portes fermées qui a drainé le plus grand nombre d’entrée avec un chiffre frisant les cent mille (96 399). Il est suivi d’une comédie, déjà en place depuis trois ans (Route pour Kaboul de Brahim Chkiri). En troisième place nous retrouvons celui qui aime se présenter comme « le sultan du box office », Saïd Naciri avec son excellente comédie Sara. Tiens ! Voilà un authentique auteur complet qui a échappé au sélectionneur de Rabat : Naciri écrit et réalise lui-même ses films. N’est-ce pas  la définition même d’un auteur ? En plus, il ne triche pas avec le public.

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