Le
silence pour dire…la
détresse
Qu’est-ce qui peut réunir
Touria Jabarne, Najat Atabou, Fatéma Loukili et Touria Hadraoui ? Seul un
cinéma polyphonique, tel celui de Mostafa Derkaoui peut imaginer une telle
combinaison, un tel « montage »
de figures artistiques et médiatiques, de personnalités fortes et imposantes par leur
charisme, leur prise de position et leur défense des valeurs humanistes. C’est
le secret de ce casting inédit du film court métrage, Le silence, qui sera
présenté dans la cadre de l’hommage à Mostafa Derkaoui à l’initiative de
l’espace cadres du PPS à Casablanca. C’est un événement exceptionnel dans la
mesure où le film n’est pas très connu, n’ayant pas bénéficié à l’époque d’une
distribution particulière. Le silence est un court métrage qui représente un
segment d’un long métrage collectif produit par le grand et sympathique
producteur tunisien Ahmed Bahaedine Attia, Hmayed pour les intimes. Nous sommes
au début des années 1990, le monde arabe vient d’être terrifié par les horreurs
de la guerre du Golfe et l’invasion de l’Irak : les intellectuels et les
artistes, notamment, sont abasourdis par les images de destruction qui ont
renvoyé à l’âge de la pierre le pays qui a vu l’invention de l’écriture. Attia
décide de faire quelque chose dans son domaine, le cinéma. Il choisit cinq
cinéastes du monde arabe et leur donne carte blanche pour réagir à leur manière
à la catastrophe qui s’est abattue sur cette région. Cela va donner, un long
métrage, La guerre du Golfe…et après ? Où nous retrouvons des cinéastes,
les plus doués de leur génération qui signent chacun un épisode : C’est
Shéhérazade qu’on assassine de Nouri Bouzid (Tunisie) ; A la
recherche de Saïma de Nejia Ben Mabrouk (Tunisie) ; Eclipse d’une
nuit noire de Borhane Alaouié (Liban) ; Hommage par assassinat
d’Elia Suleiman (Palestine) ;
et du Maroc, c’est Mostafa Derkaoui qui participe avec Le Silence.
Pour les nouvelles générations
qui vont le découvrir, ils auront un aperçu éloquent de la démarche du
cinéaste : une écriture transversale qui convoque différentes formes
d’expression avec comme élément déclencheur une quête. Ici aussi c’est une
double quête, une équipe de film qui cherche à aller en Irak pour filmer le
jour d’après et une journaliste qui mène une enquête sur la prostitution dans
les milieux fréquentés par les riches du Golfe. Un emploi qui bouscule les
codes du genre, on y découvre Najat Atabou dans ce qui est son meilleur rôle et
puis des images qui crient la détresse, l’impuissance et la colère.
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