jeudi 7 août 2014

Le festival du court métrage de Tanger en danger


Horizon incertain
la cinéaste palestinienne Nejwa Nejjar lors de ses débuts à Tanger

Les tangérois aiment parler de leur ville avec des métaphores empruntées au climat, notamment avec le fameux Cherqui qui marque les corps et les esprits…Aujourd’hui c’est un autre vent qui souffle sur Tanger et son festival de court métrage méditerranéen, un vent d’incertitude, pire que la brise venant de l’est puisque c’est un souffle qui vient semer le trouble et balayer un édifice prometteur.
De sources proches des organisateurs on apprend en effet que la prochaine édition (la 12ème) du festival du court métrage méditerranéen prévu en principe du 13 au 18 octobre 2014 risque tout simplement d’être annulée, faute de subvention. La commission installée par le ministre de la communication tergiverse en effet pour accorder les fonds nécessaires à l’organisation de l’un des festivals les plus prestigieux du pays. Réunie dernièrement à Rabat, la commission a cru intelligent de reporter sa décision pour le festival de Tanger arguant l’absence de moyens. Le budget traditionnellement alloué au festival du court métrage de Tanger tourne autour des trois millions de dirhams pour une programmation riche et diversifiée plus de 40 films en compétition officielle, une vingtaine de pays représentés, une quarantaine de journalistes nationaux et internationaux…bref un vrai événement culturel et artistique. L’année dernière déjà, le budget du festival a été amputé d’un bon tiers obligeant les organisateurs à revoir à la baisse leurs ambitions notamment au détriment d’une rubrique phare du festival, celle du Panorama du court métrage marocain, un moment fort et une vraie fête pour les jeunes cinéastes marocains qui transforment la séance de projection de leur film en une véritable avant-première pour fêter la présentation de leur travail à leurs collègues de la méditerranée. Crée en 2002 avec l’initiative du ministre poète Mohamed Al Achaari, ayant pris sa vitesse de croisière en 2004 avec l’arrivée de M. Saïl à la tête du CCM, soutenu activement par MM. Nabil Benabdellah et Khalid Naciri lors de leur exercice à la tête du département de tutelle, le festival a forgé ses lettres de noblesse et il est considéré à juste titre par de nombreux observateurs comme le plus grand rendez-vous du court métrage de la rive sud de la méditerranée.
Aujourd’hui c’est un tournant décisif que vit le festival ; une situation absurde en complète contradiction avec les attentes des jeunes marocains qui investissent le champ de la production cinématographique et qui voient dans le festival une formidable vitrine pour leurs travaux (depuis quelques années le festival a instauré une section ciné-école, présentant une sélection des courts métrages réalisés par les étudiants de cinéma) ; c’est en outre une situation en déphasage avec les orientations stratégiques du pays rappelées avec force lors du dernier discours du Trône qui appelle à réhabiliter « le capital immatériel » du pays. Les hésitations de la commission de subvention des festivals sont d’autant plus incompréhensibles qu’elle est, en principe, composée de compétences ayant vécu de près les atouts et les qualités du festival. Beaucoup de jeunes cinéastes marocains et méditerranéens, dont de nombreux palestiniens ont trouvé à Tanger un véritable tremplin qui a marqué positivement leur carrière. Revenir sur ces acquis en cassant cet élan est tout simplement un crime de lèse-majesté culturel. L’histoire n’hésitera pas à s’en souvenir dans ses appendices noirs.

Mohammed Bakrim

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