Feu Abdellah Mesbahi
Je souhaite tout d’abord féliciterla
Fondation du Festival International du Film de Marrakech pour cette belle
initiative et remercier son Président, Son Altesse Royale le Prince Moulay
Rachid, ainsi que ces deux vice-présidents, M. Faïçal Laraichi et Sarim El Haq Fassi
Fihri. Cette initiative a une forte portée symbolique aussi bien sur le plan
humain que professionnel.
Nous honorons la mémoire d’un des
pionniers du cinéma marocain, feu Abdellah Masbahi. Qu’un Festival aussi
important que celui de Marrakech rende un tel hommage, témoigne, une fois de
plus, de l’intérêt que le Festival porte au cinéma marocain. Les hommages
posthumes qu’il rend cette année sont hautement symboliques puisqu’ils évoquent
la mémoire de deux cinéastes, Abdellah Masbahi et Abbas Kiarostami. Leurs
parcours et leurs choix sont très différents mais ils sont unis par l’amour que
chacun d’entre d’eux porte, à sa manière, au cinéma.C’est cette passion pour le
cinéma qui a poussé le Festival de Marrakech à les célébrer. Ce Festival de
grande envergure n’oublie pas ses amis.
Abdellah Masbahi est en effet un grand
passionné de cinéma. On dit qu’il y a ceux qui « habitent le cinéma »
et ceux qui sont habités par le cinéma. Et Abdellah Masbahi est de ces derniers,
car on ne peut pas dissocier entre sa vie et le cinéma ni entre le cinéma et sa
vie.
Abdellah Masbahi, décédé à la fin
de l’été dernier, est né dans la ville d’El Jadida. Cette ville moderne par
excellence a enrichi la scène culturelle marocaine grâce à une brillante élite
de créateurs dans tous les domaines. C’est dans cette ville ouverte et
multiculturelle que Masbahi a décidé de faire du cinéma un choix de vie. Pour cette
raison, il s’est rendu à Paris à la fin des années cinquante et y a reçu une formation de théâtre et de cinéma.
A son retour au Maroc, il a occupé
un certain nombre de fonctions administratives dans le domaine du cinéma, mais
son ambition était autre ; aussi s’envolât-il pour le Moyen Orient. Ce fut
un tournant décisif car il prit
conscience de la nécessité d’un cinéma ouvert sur le public et sur ses
préoccupations.
Dans les années soixante-dix,
dite« décennie des auteurs », alors qu’un groupe
de jeunes cinéastes marocains remettait en cause le langage cinématographique
pour créer un discours plus esthétique et radical, Abdellah Masbahi a, quant à
lui, fait le choix d’utiliser le langage cinématographique dominant - dans sa
variante égyptienne- pour toucher un public plus large.
Et c’est ainsi qu’on peut dire, de
manière tout à fait objective, qu’il était porteur d’un projet
cinématographique intégré et cohérent, dont les éléments peuvent
se résumer ainsi : « pour un cinéma populaire et social à vocation
internationale ».
Pour ce faire, il a concentré tous
ses efforts sur trois domaines principaux :
La production : il a
diversifié ses productions en vue d’une industrie cinématographique arabe
commune.
La thématique : il s’est très
tôt intéressé à des thèmes brûlants tels que l’hypocrisie sociale, la drogue,
le radicalisme religieux, le conflit géostratégique.
Le casting : il a été l’un des
premiers à faire travailler ensemble des stars locales et internationales,
comme Abdelhadi Belkhayat et Souad Housni, dans une association unique en son
genre.
Un projet cinématographique qui a
connu aussi bien des succès que des échecs, qui a suscité débats et controversesmais
qui fait, aujourd’hui, partie du patrimoine cinématographique marocain.
Abdellah Masbahi, aux multiples
talents, ne nous a pas légué un seul projet. Il nous a laissé un autre projet, humain
cette fois-ci, et c’est peut être l’une de ses meilleures productions. Nul
doute que ce projet, par contre, fait l’unanimité. Il s’agit de la talentueuse, Imane Masbahi, réalisatrice, productrice et
distributrice de films.
Je salue la mémoire du défunt et souhaite
plein succès à Imane, qui perpétue l’héritage de son père. Je souhaite longue
vie au cinéma marocain et à notre festival de Marrakech !
(texte traduit par les services du festival)
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